qUELS MUSCLES étirer? Pourquoi? Comment?
Les articles précédents (La vérité sur les étirements et S’étirer, une question de réflexes) nous l’auront démontré, qu’il soit passif, CRE ou CRAC, le stretching doit faire partie intégrante de la préparation du coureur. Mais quels groupes musculaires privilégier autour du trail? Quels étirements peuvent convenir à ces muscles? L’article n’a pas la prétention d’aborder la question dans son exhaustivité. Les exemples abondent sur la toile. Voici cependant un petit aperçu des fondamentaux du coureur, classés par ordre décroissant d’importance.
Les ischio-jambiers
Ils font partie de la chaine postérieure et ont la fâcheuse tendance à se raccourcir. Ce qui vaut pour le sédentaire l’est encore plus pour le coureur de longue distance. Les conséquences en sont une limitation de la flexion du bassin. La statique de la colonne lombaire s’en trouve perturbée, induisant de fait de nombreuses pathologies (lombalgies notamment).
Une moindre raideur de ces fléchisseurs du genou diminuera également la sollicitation des quadriceps (extenseurs) dans le dénivelé positif. De fait, la prévention du syndrome rotulien passera également par des étirements des ischio-jambiers.
Position : le haut du corps penché en avant, le dos le plus droit possible (ne pas chercher à descendre en arrondissant le dos), avec une bascule du bassin vers l’avant (antéversion).
Méthode CRE : contracter les ischios avec l’intention d’enfoncer le talon dans le sol (5s) ; relâcher la tension 3s ; puis, se positionner pour étirer, tout en contractant les quadriceps (20s).
Etirement passif de la chaîne postérieure : allongé sur le dos, les membres inférieurs placés à la verticale. L’idée est de chercher à tendre les jambes (mais en fonction de sa souplesse on peut garder les genoux plus ou moins fléchis), tout en gardant les fesses en contact avec le sol. Amener le menton à la poitrine et tirer les pointes de pieds vers soi.
La posture peut être maintenue plusieurs minutes.
Le psoas-iliaque
Le psoas (associé à l’iliaque) est un muscle fléchisseur de hanche prenant son origine sur les vertèbres lombaires. C’est ce dernier point qui est problématique. Car un psoas contracturé ou raccourci aura pour conséquence d’exercer une double tension sur ces lombaires, comme le montre le schéma ci-dessous : vers le bas, ce qui comprime les disques intervertébraux et vers l’avant, accentuant ainsi la lordose. Un étirement régulier du psoas permettra de se prémunir contre de nombreuses pathologies de la colonne lombaire.
Vues de face et de profil du psoas
Étirement passif : la jambe étirée en arrière, en appui sur le genou (sur surface souple). Avancer l’autre jambe de manière à avoir le genou à la verticale du pied.
Dans cette position, abaisser la hanche sans creuser le bas du dos et tenir 20s minimum.
Les muscles fessiers et pelvi-trochantériens
Les fessiers sont des extenseurs de hanche et sont donc sollicités lors de la course à pieds. Mais de la même manière que les muscles pelvi-trochantériens, ce sont des rotateurs externes. Ce qui signifie que leur hypertonicité favorise une ouverture de jambe et par conséquent une modification de la foulée, faisant le jeu de futures blessures.
L’étirement de ces muscles a de plus un rôle préventif en matière de sciatique. Un entrainement intense peut en effet provoquer une contraction du pyriforme (qui est un muscle pelvi-trochantérien) qui aboutira chez certains à une compression du nerf sciatique.
Etirement passif : sur le dos, amener un pied sur le genou de la jambe opposée. Passer les mains sous ce genou et tirer vers la poitrine.
Étirement passif : à quatre pattes, amener un pied devant la cuisse opposée. Pousser la jambe opposée vers l’arrière. Tenir 30s minimum.
Les quadriceps
Ce sont les muscles principaux de la locomotion du coureur. Ils sont encore plus fortement sollicités en trail du fait du dénivelé (positif et négatif). A ce titre, il conviendra de les étirer : pas tellement pour l’amplitude articulaire, mais plutôt pour prévenir des dommages musculaires.
Par ailleurs, du fait de son insertion sur la rotule, le quadriceps a une importance considérable dans les blessures liées au « genou du coureur » (syndrome rotulien). En effet, toute surtension musculaire aura pour conséquence de gêner le cheminement de la rotule dans son sillon. Les étirements auront sur ce point un rôle préventif indéniable, ce qui sera d’autant plus important pour les coureurs ayant les genoux en « X » ou les pronateurs chez qui cette pathologie est plus fréquente.
Position : Tenir dans sa main le coup de pieds ; basculer son bassin en arrière (rétroversion) ; garder le buste droit ;
Méthode CRAC : exercer une pression contre la main pendant 5s ; relâcher la pression tout en gardant la position (3s) ; augmenter la flexion du genou pour étirer en tirant avec son bras et en contractant les ischio-jambiers (30s).
Méthode CRAC : Buste droit et bassin en rétroversion, laisser descendre lentement le haut du corps pour prendre appui au sol avec ses mains ; relâcher 3s ; puis avancer le bassin le plus haut possible tout en contractant les fessiers (20s)
Les mollets
L’étirement du triceps sural a une réelle efficacité en matière de prévention de la tendinite d’Achille, mais encore de l’aponévrosite plantaire. Il conviendra donc de l’intégrer dans la séance de stretching, qui plus est pour les femmes qui portent souvent des talons hauts (en dehors de la course à pieds quand même), ce qui raccourcit les mollets.
En outre, des mollets assouplis permettront au traileur d’avoir une pose de pied à plat sur une inclinaison plus importante lors d’une côte marchée. Economie de déplacement et adhérence en seront améliorées !
Etirement passif : debout, face à un mur, une jambe en arrière. Les talons au sol, plier le genou avant jusqu’à éprouver une sensation d’étirement.
Jambe arrière tendue pour un étirement de tout le triceps sural.
Jambe arrière fléchie pour un étirement isolé du soléaire.
Tenir la position 30s minimum.
Les adducteurs
L’hypertension de ces muscles est souvent incriminée lors de la survenue d’une pubalgie. Sans se lancer dans le grand écart facial, le stretching des adducteurs sera un moyen de prévention indispensable de cette pathologie.
Étirement passif : assis sur le sol, les jambes écartées et tendues devant soi, aller chercher devant et vers le bas avec le buste tout en essayant de ne pas plier les genoux.
Les jambiers antérieurs (ou tibials antérieurs)
Le traitement de la périostite ainsi que de la tendinite du tibial antérieur (tendinite fréquente chez l’ultra-traileur) passe par un étirement de ce muscle. Sur ce point également, il est sage de prévenir plutôt que de guérir.
En conclusion, il conviendra d’ajouter que nous ne sommes pas égaux face au stretching. Des études récentes confirment que certains verront leur mobilité articulaire croitre dès la première séance quand d’autres resteront insensibles à cette pratique. Sur cette dernière catégorie, il n’existe pas à ma connaissance d’études permettant de savoir si le stretching a un quelconque bénéfice pour un sportif ne réagissant pas aux étirements. Dans le doute, on prend son mal en patience et on s’étire… doucement, mais sûrement !